"Val de Grâce" de Colombe Schneck
Editions Stock, 144 pages, Août 2008
Présentation de l'auteur
Est-ce qu'on me pardonnera d'avoir été aimée à ce point ? se demande la narratrice. Est-ce qu'on lui pardonnera la
chance inouïe d avoir passé les vingt-trois premières années de sa vie au « Val de Grâce » ?
Comment oublier 200 mètres carrés dans un immeuble haussmanien, rue du Val de Grâce, au coeur de la capi-
tale ? Comment oublier les odeurs, le toucher d'un appartement dont on connaît le moindre recoin, la moindre
éraflure ? Les nombreux meubles, l'accumulation des objets, l'originalité des décors, le papier doré et argenté des
murs ? Comment oublier l'enfance heureuse, préservée, qui donne droit à tout : aux confiseries et à la boulangerie
à compte ouvert ; à la patience de Madame Jacqueline ; aux rêves de princesse de contes de fées ?
Au Val de Grâce, tout devient beau, tout y est magique. Tout paraît éternel. Les enfants ne voient pas le manque
d argent. L usure, le temps qui passe. On ne leur raconte pas la douloureuse histoire familiale, les parents juifs
immigrés fuyant la Shoah.
Mais cette histoire a son terme au bout de vingt ans. La disparition de la mère sonne la dernière fête, puis la liqui-
dation du Val de Grâce. C'est l'enfance qui s en va, les traces des parents, les souvenirs joyeux. Chez soi, en soi, on
conserve un mini Val de Grâce, de précieuses reliques. Un jour, alors que la vie est en miettes, on comprend qu 'l
faut liquider Val de Grâce, le faire revivre une dernière fois pour mieux refermer la porte sur le passé.
Chacun, un jour dans sa vie, se trouve confronter à cet instant où il faut fermer la porte de son enfance. Oublier. Je dirais plutôt occulter l'inévitable. C'est le premier réflexe. Refuser de voir qu'en fermant cette porte, l'enfance est bien terminée...que nous ne sommes plus les "enfants de". Parfois, on prolonge l'instant en "gardant" tout intact, on poursuit le rêve, parfois on refuse de retourner sur ce lieu "magique" de l'enfance par peur que tout remonte et nous anéantise...on laisse le deuil faire son chemin...et sur ce chemin , on découvre ce que l'enfance nous a parfois épargné pour mieux nous construire. Ne pas faire porter le poids de sa propre histoire au point que le petit d'homme en arrive à mal respirer.
Colombe Schneck a vendu peu de temps après la mort de sa mère...trop vite...il n'y avait pas d'urgence....et tout s'est bloqué...il lui fallait donc écrire...réparer l'oubli...
...en fait, rien n'est oublié, seulement enfoui ...
Fermer la porte à tout ce bonheur, celui de l'enfance insousciante, ce n'est pas chose facile. Dans la vie de Colombe Schneck, tout était doré. Elle avait des parents aimants, des parents qui ne lui refusaient jamais rien...trop de chance, trop de bonheur...c'est presque insupportable à entendre...elle a eu la chance de vivre dans la plus belle ville du monde, dans le quartier le plus beau, soit!!...mais ce qu'elle ressent, c'est ce que d'autres moins "chanceux" ressentent aussi...perdre cet amour aveugle, cet surprotection que, seuls, des parents aimants peuvent donner à leurs enfants .
Je me suis demandée pourquoi cette drôle de question :"Est-ce qu'on me pardonnera d'avoir été aimée à ce point ?"...pourquoi ce sentiment de culpabilité face à l'amour?
"Les parents doivent tout à leurs enfants, leurs enfants ne leur doivent rien." dit le père.
Colombe Schneck considère que son bonheur, c'est cet appartement, cette richesse, cette liberté offerte que d'autres n'ont pas eu...ça m'a dérangée parce que je considère que le problème n'est pas là...."Comment j'en étais arrivée à ce point à oublier ses leçons?". se demande-t-elle..
Ce que Colombe a oublié - et c'est de cela qu'elle se sent coupable- c'est le pourquoi de ce "trop d'amour", pourquoi ses parents n'ont rien refusé à leurs enfants au point de les rendre mal élevés.
Ne pas oublier l'essentiel: Aimer. Être aimée.
3/60
Les avis de Lily, de Clarabel, de Stephie